Le document attribué au CERN poursuivait:
6. Projets pour le XX° Siècle
N'ayant pas identifié, pour le moment, d'autres possibles acteurs-historiens du passé, on décida d'élaborer un plan pour envoyer des agents dans une époque plus proche. Il y eut de nombreuses propositions et l'on retint, entr'elles, pour le XX° Siècle, le cas de l'assassinat du président J-F.Kennedy en 1963, jamais totalement éclairci par les historiens, la naissance de Silicon Valley et des grandes entreprises de logiciels, et l'étrange naissance de la World Wide Web au sein du CERN lui-même. Ces trois cas furent exposés avec précision et furent fixés dans l'agenda. Un historien belge parla aussi d'un fait étrange de la fin de la II° Guerre Mondiale dans son pays, mais l'on manquait de détails pour savoir comment opérer et on le chargea de mieux étudier le cas pour pouvoir ensuite présenter un projet plus précis. On pensa passer ensuite su XIX° Siècle, pour explorer les grands avancements scientifiques et techniques de ce siècle, et passer ensuite au XVIII°.
Ce fut ainsi que nous avons envoyé cette année un premier agent, pour quelques semaines, au CERN de 1990 et, quand il revint, une fois évaluée l'expérience, aux États-Unis de 1963 puis en 1970. A un autre, nous l'avons envoyé en Belgique quelques décades plus tôt pour assurer la protection du roi Léopold durante la Seconde Guerre Mondiale.
Ce qui arriva au CERN en 1990 nous démontra que de petits progrès historiques provoqués par nos agents sont possibles. Nos historiens, en effet, nous avaient signalé ce qu'avait d'étrange la naissance de la World Wide Web au sein du CERN. Le Centre n'avait rien à voir avec le développement des réseaux informatiques ou des applications requises, sauf celles nécessaires pour le fonctionnement et contrôle de son propre équipement d'analyse des expériences de physique atomique. La web aurait dû naître aux États-Unis, où le concept d'hypertexte avait été inventé par Théodore Nelson en 1981, lui-même basé sur le concept de "memex" conçu par Vanevar Bush en 1945. A la fin de la décade de 1980, le réseau Bitnet y était développé et plusieurs programmeurs américains créaient un système nommé Gopher pour la transmission publique de textes, une espèce de web limitée au texte.
A ce moment, le CERN commençait à planifier un des projets scientifiques les plus ambitieux: le collisionneur de particules LHC. Et les physiciens participant à ce projet, tant du CERN comme de diverses universités de plusieurs pays, avaient un besoin urgent d'établir un système efficace pour partager l'information. La clé s'en trouva dans la proposition de Berners-Lee: l'hypertexte transmis sur réseau numérique, instrument génial qui nous permet de "cliquer" sur une information qui nous intéresse pour avancer dans une autre direction où nous pouvons trouver plus de données et d'autres liens pour continuer à "naviguer" et accéder à d'autres informations. Berners-Lee pensa d'abord appeler cela "maille d'information" ("infomation mesh") ou "mine d'information" ("mine of information"). Un an a dû passer pour qu'en 1990 il lui donna le nom de World Wide Web (WWW). Il semble clair que Berners-Lee ne connaissait pas le projet Gopher, mais utilisait déjà le réseau numérique pour communiquer avec ses collègues, connaissant donc ses limitations et son potentiel. Mais qu'est-ce qui le poussa à penser à l'hypertexte? Comment sut-il de l'idée de Théodore Nelson, que personne -jusqu'alors- n'avait exploitée? Et pourquoi chercha-t'il un programmeur belge pour créer le lenguage spécial requis pour produire et transmettre les hypertextes? Nous avons donc envoyé un de nos ingénieurs à l'année 1989, pour rencontrer Berners-Lee.
Selon ce qu'il nous raconta au retour, il lui avait demandé s'il connaissait Théodore Nelson, obtenant une réponse négative. Berners-Lee lui demanda alors qui c'était et l'agent, sans y penser, lui parla de l'hypertexte. Ainsi, l'invention de la WWW fut le résultat d'un paradoxe du voyage dans le temps: le futur conformant le passé.
A la fin de l'année, après le retour de cet agent, nous l'avons envoyé aux États-unis de 1970. C'est le projet de plus longue haleine, car il devrait prendre dix ans, pour étudier l'essort de l'industrie des ordinateurs, jusqu'à la naissances des PC. Il nous faudra donc attendre autant d'années pour avoir son rapport.