23/02/2010

L'héritage 8.2.

Après être sorti du bâtiment, Trompel se rendit compte que la nuit approchait déjà. Il calcula que son hôtel devait être assez près s'il suivait l'avenue Amstel du même côté de la rivière et se disposa donc à y retourner à pied par l'avenue abondamment illuminée. L'hôtel était passé le second pont. En arrivant au premier, le Magerebrug, une auto s'arrêta devant lui quand il allait traverser la Kerkstraat, lui bloquant le passage. Duex hommes aux vêtements obscurs et lunettes solaires en descendirent rapidement, le prirent brusquement par les bras et le poussèrent dans le véhicule. Ils partirent ensuite à toute vitesse. On le raptait de nouveau!

On l'obligea à se mettre à genoux sur le sol de l'auto et à baisser la tête. Puis on lui lia les mains et les pieds et on lui boucha la bouche avec une bande adhésive. Pendant ce temps, le véhicule continuait par la Kerkstraat, s'approcha du Muidergracht qu'il traversa, continua sur une dizaine de pâtés de maisons et s'arrêta finalement dans une zone solitaire. On tira Trompel hors de l'auto et on se préparait à le lancer à un canal lorsqu'une sirène se fit entendre. C'était une patrouille de la police qui s'approchait à toute vitesse. L'effort que devaient faire les délinquants pour lancer Trompel à l'eau était trop important pour qu'ils puissent le faire rapidement. Ils préférèrent le laisser à terre et tentèrent de remonter dans leur voiture pour s'enfuir. Mais la patrouille leur bloquait le passage et les agents, arme au poing, leur crièrente de s'arrêter. Alors que les agresseurs sauataient dans l'auto, le chauffewur avait mis marche arrière, pour tenter de s'évader de l'autre côté, mais les policiers tirèrent au travers du parebrise, le blessant gravement. Les deux autres hommes sautèrent alors de nouveau à terre pour tenter de s'enfuir à pied, mais une autre voiture patrouille arrivait du côté opposé et ils de trouvèrent entre deux feux, obligés de se rendre. Entre temps, l'un des policiers que premier véhicule libérait Trompel lui demandant qui il était. Il expliqua rapidement ce qu'il faisait à Amsterdam et son contact avec l'inspecteur Wienants.

Après un bref conciliabule entre les deux groupes de policiers, la deuxième patrouille partit avec les deux prisonniers. L'autre attendait l'ambulance qui prendrait le chauffeur blessé et on signala à Trompel qu'il devrait déposer son témoignage devant la justice, ce pourquoi il serait convoqué dans deux ou trois jours. On offrit de le conduire à son hôtel après l'arrivée de l'ambulance. Il demanda si l'hôtel était loin et on lui répondit qu'après avoir traversé le canal il n'aurait qu'à avancer six pÂtés de maisons, par la Sarphatistraat. Il leur dit que, dans ce cas, il pouvait parfaitement s'y rendre à pied et que cela lui servirait pour penser à ce qui venait de se passer. Cette fois, il y avait bien un délit grave lié aux autres!

Arrivé à l'hôtel, il tenta de contacter l'inspectrice Wienants mais elle avait déjà abandonné son bureau. Le lendemain, après son petit-déjeûner, il l'appela de nouveau et elle était déjà au courant de ce qui s'était passé. Et elle avait des informations à ce sujet. On avait en effet découvert tout de suite que le chauffeur des agresseurs, qui vaait été blessé, était celui qui transportait habituellement les équipages de la ligne aérienne Lan Pérou, qui couvrait le trajet La Paz-Lima-Madrid-Amsterdam. Le véhicule appartenait à une firme nommé Internationaal Veiligheid Systeem Gezelschap. Les deux détenus, qui avaient séquestré Trompel, n'étaient pas connus de la police locale. Ils furent enregistrés et on envoya ces données à Interpol. Ce qui semblait plus significatif et liait définitivement les deux cas était que le numéro IP de l'ordinateur qui avait attaqué Lamercam appartenait à cette même entreprise. Ainsi, Wienants reconnut que Trompel avait eu raison de considérar le piratage comme lié aux autres cas et à ce qui lui était passé. Elle l'avertit aussi de ce qu'elle passerait le prendre à son hôtel pour aller ensemble, avec d'autres agents, réaliser la perquisition de l'entreprise.

Pendant qu'il l'attendait, le détective associa le nom hollandais de la firme avec celui qu'avait donné Teplisty: InterSystem devait être le condensé de Internationall Systeem. Y s'ils s'occupaient des équipages qui voyageaient de La Paz à Amsterdam, il pouvait y avoir là une autre piste relative au trafic de drogue. Bien que l'on disait que la drogue circulait librement en Hollande, ce n'était pas totalement vrai. Ce l'était pour les drogues "douces" comme la marihuana, et il y avait beaucoup de programmes orientés à la réhabilitation des adictes. Mais les drogues dures, comme la cocaïne et l'héroïne étaient interdites et le trafic sanctionné. Bien que, vu l'importance de ses ports, le pays était un endroit important pour le commerce illégal européen.

Un quart d'heure plus tard, l'inspectrice Wienants prenait le belge et, avec les autres agents, se dirigeait vers Pakhuis Amsterdam, où était située l'entreprise qu'ils avaient identifiée. En chemin, elle lui raconta ce qu'elle avait découvert: InterSystem offrait des services de sécurité à des centres commerciaux y moyennes entreprises, qui incluait des gardiens, des camionettes blindées, des systèmes électroniques et des logiciels de protection de systèmes informatiques. Elle avait cependant très peu de personnel: pas plus de dix personnes, ce qui n'était pas en proportion avec son bilan commercial qui montrait un chiffre d'affaires de plusieurs millions d'euros. C'était très douteux.

Les soupçons augmentèrent lorsqu'ils arrivèrent à l'adresse, au Jollemanhof, juste au-dessus des bureaux de Greenpeace Nederland. Les bureaux ne représentaient en rien ce qu'on attendrait d'une firme de sa catégorie. A peine une réception, un bureau pour le gérent -avec un minimum de meubles-, une petite salle avec ordinateurs pour deux employés et une salle de réunion minime. Le gérent était absent et la réceptionniste se vit obligée à monter les locaux et à laisser les policiers chercher partout. Auncun meuble de classement n'était visible: tout était sans nul doute dans les ordinateurs.

Ils prirent note des noms et adresses des deux opérateurs d'ordinateurs et les enfermèrent dans la salle de réunion. Les agents experts en informatique s'installèrent face aux machines, reconnaissant à l'instant que l'une d'elle avait été le point de départ de l'attaque contre Lamercan. Ils virent aussi qu'il y avait des dossiers codififiés qu'il leur faudrait tenter d'ouvrir plus tard, avec un logiciel policier spécial. Pour cela, il faudra emporter les ordinateurs à leur laboratoire, pour les analyser plus en détail. Il pouvait aussi y avoir des dossiers cachés.

L'inspectrice Wienants, entre temps, interrogeait la secrétaire-réceptionniste sur l'entreprise et ses chefs. Ce ne fut pas une surprise pour Trompel d'apprendre que le gérent s'appelait Karl Teplisty. Le belge demanda alors s'ils utilisaient le nom d'InterSystem et elle reconnut qu'ils le faisisent de façon habituelle pour les contacts hors de Hollande. Il demanda aussi s'ils avaient un bureau à Andorre et elle répondit qu'elle n'en avait jamais entendu parler. Wienant continua son interrogatoire. La secrétaire ne savait rien des propriétaires et financiers de la firme. Elle confirma qu'ils avaient un contrat pour transporter les équipages de Lan-Pérou et donna l'adresse des entrepôts "avec hautes mesures de sécurité" qu'ils offraient en location à des tiers. Elle remit aussi l'agenda téléphonique ainsi que la liste des clients habituels.

Pendant ce temps, deux autres agents étaient allés interroger les opérateurs. L'un d'eux déclara être comptable et l'autre un simple employé chargé de surveiller les opérations et le personnel dont les services étaient offerts, comme les chauffeurs et les guardes. Il y avait le chauffeur de l'auto -celui qui avait été blessé lors de la tentative de rapt de Trompel- et celui de la camionette blindée, pour le transport de valeurs, ainsi qu'une douzaine de guardes qui travaillaient dans un centre commercial proche. Les noms, adresses et activités étaient enregistrés sur l'ordinateur et la police pourrait les y consulter. Ils savaient cependant que d'autres personnes utilisaient les machines, sans être enregistrées dans la liste du personnel. Cela se passait la nuit, et ils ne les avaient jamais vu. Ils n'étaient au courant que parce qu'ils avaient été avertis de ne pas se préoccuper des signes de leur activité et des archives codifiées.

Finis l'inspection et les interrogatoires, les employés furent sommés de ne pas abandonner la ville. On leur dit aussi d'avertir de même le gérent lorsqu'il arriverait et une citation a comparaître fut laissée pour lui. Les cyberdétectives déconnectèrent les unités centrales (CPU) de lerus périphériques, pour n'emporter que celles-çi. Ils sortaient justement avec les machines lorsque Teplisty apparut.
- Que se passe-t'il ici? De quel droit emportez-vous nos ordinateurs?
- Police! Qui êtes-vous?
- Je suis Karl Teplisty, le gérent.
- Vous êtes arrêté! Vous devrez nous accompagner pour être mis à disposition du Ministère Public.
- De quoi m'accuse-t'on?
- D'essai de fraude informatique, de complicité de séquestre et assassinat.
- Mais cela est absurde! Je ne sais pas à quoi vous faites allusion. Notre firme s'attache justement à empêcher ce genre de choses!
- Vous en saurez plus quand vous serez formalisé au tribunal. Accompagnez-nous!

On lui passa des menottes et on le fit monter dans une des voitures. Les ordinateurs furent mis dans le coffre. Tous montèrent et la petite caravenne partit les uns pour l'hôtel de ville, les autres vers le complexe judiciaire de Schiphol, se lo ce qu'expliqua Wienants à Trompel. Là bas, près de l'aéroport, était l'édifice des tribunaux et la prison où étaient enfermés les suspects durant les enquêtes. La sécurité y était à charge de la Koninklijke Marechaussee, la gendarmerie royale. L'enquête serait à charge d'un fiscal et de la police judiciaire d'Amsterdam. Mais comme, dans ce cas, il s'agissait à première vue d'un cas de crime international, on désignerait sûrement une équipe spéciale d'Eurojust, le système européen de coordination judiciaire de l'Union Europénne. Ce que Trompel avait dit à l'inspectrice hollandaise serait résumé et annexé au dossier pour justifier l'internationalisation du procès, mais sur ce qui était arrivé en Belgique, il devrait témoigner officiellement devant les autorités belges. L'équipe d'Eurojust se mettrait ensuite en rapport avec la PJF et le juge belge chargés de ce cas dans le pays voisin pour tout ratifier et compléter.

Trompel ayant été séquestré à Amsterdam, il devrait se présenter à ce Centre de Justice pour prêter témoignage officiel et pourrait ensuite retourner chez lui. Wienant promit de d'obtenir la citation au plus tôt, sûrement le lendemain, et de l'avertir de l'heure et de la salle où se présenter. Elle l'informerait aussi de quelque nouveauté que ce soit liée à l'enquête.