La semaine suivante...
- Chef, j'ai assisté déjà à trois réunions. Ils répètent souvent leurs invectives contre les politiciens traditionnels et le gouvernement actuel. Et ils proposent une réforme du système éducatif pour enseigner les valeurs de l'égalité et de la solidarité. Ils disent qu'on a développé un système pédagogique magnifique au Brésil, appelé "conscientisation", qui a prouvé son efficacité en Amérique Latine. Je vais en chercher plus d'information. A la fin de la dernière réunion, je leur ai dit que c'était peu commode de venir chaque semaine de Bruxelles mais que j'aimerais continuer à participer. Ils m'ont dit alors que si je m'inscrivais dans le parti, je pourrais participer à la cellule de Bruxelles et les y aider à obtenir de nouveaux sympathisants. Ils m'ont donné un formulaire d'inscription et m'ont dit de l'envoyer à l'adresse du parti qui y apparait. Ils m'avertiaient ensuite où et quand me diriger pour les réunions. Qu'en pensez-vous?
- Je crois qu'il serait bon que tu t'inscrives, pour continuer à t'infiltrer.
- Il y a autre chose qui m'inquiète: à chaque réunion il y avait un assistant à tête d'arabe. Et il était toujours très attentif et silencieux. La dernière fois, j'ai essayé d'être le dernier à sortir pour tenter de savoir quelque chose sur lui, mais ce fut impossible car il est resté là. J'ai alors attendu dehors, mais un quart d'heure après il ne sortait pas encore. Je n'ai pas pu rester plus longtemps car il n'y avait aucun endroit où j'aurais pu me cacher, et continuer à me promener sur le trottoir aurait été suspect.
- je crois que cela pourrait intéresser la Direction de Sécurité DST. Surtout si, en même temps, ils continuent à exprimer de mauvaises intentions en relation aux autorités. Mais alors, je crois qu'il serait bon que tu retournes encore une fois à Liège, te faisant accompagner par quelqu'un qui te remplacera et s'infiltre là-bas. Cela pourrait-être quelqu'un de la DST: ils sont moins connu que nos hommes de là-bas. Ainsi nour leur passerons l'enquête en province et nous continuerons à voir ce qui se passe à Bruxelles.
Trompel trouva sur la WWW que la "conscientisation" était un procédé pédagogique développé par le brésilien Paulos Freire dans les années soixante. Son oeuvre principale est la "Pédagogie de l'opprimé" (1969), où il jette les bases de l'"éducation libératrice", qui prétend produire une sorte de nouvelle rencontre entre les hommes et leur dignité de créateurs et participants actifs de la culture qui les forme. Elle est principalement orientée aux adultes, surtout analphabètes, qu'elle porte en même temps à apprendre à lire et écrire et à analyser leur réalité au moyen d'une réflexion groupale. Dans cette analyse, on cherche les causes qui incident sur l'état de la culture et on détecte les innercies et les forces qui empêchent l'expression et la réalisation des personnes. L'enfase est mise sur les "contradictions fondamentales", comme les relations "exploiteurs-exploités", capital vs. travail, etc., ce qui semble fortement inspiré de la dialectique marxiste. Tout cela porte à concevoir la nécessité d'un révolution de conception idéaliste et assez romantique, sans une analyse des contradictions et des risques de ce qui est proposé et sans discussion du concept et de la façon dont opère la démocratie.
Le même site web où le détective trouva cette explication signalait que quelques principes exposés par Paulo Freire continuaient à être utilisés par des organisations d'extrême gauche pour organiser la formation de leurs militants et leur débat politique, spécialement de ceux qui n'ont pas beaucoup d'études et pourraient être silenciés par des militants plus préparés.
A la première réunion à laquelle il fut invité à Bruxelles, on informa Trompel sur l'organisation et le mode de fonctionnement du parti. Toys les groupes de base avaient de douze à quinze personnes et étaienta appelés des "cellules". Chaque groupe choisissait un délégué et douze à quinze délégués formmaient une nouvelle cellule qui, à son tour, élisait un délégué, et ainsi succesivement, jusqu'au comité directif. Ainsi les bases étaient représentées au sommet et celui-çi, de retour dans les bases. Les délégués pouvaient être changé à n'importe quel moment par leurs compagnons. Le parti se présentait ainsi comme extrêmement démocratique mais, comme le découvrit Trompel, c'éatit aussi un mécanisme qui protégeait le secret et emêchait les communications horizontales. Quelque chose de propre -et copié sans doute- du système soviétique. Suspect au yeux de la police.
A la troisième réunion assista le président du parti, Martin Daems. Quand on lui présenta Trompel, il le félicita pour ses articles dans le journal La Dernière Heure.
- Ce sont de très bons articles, très pondérés et correctement neutraux. Je crois que vous êtes un bon journaliste. Nous avons besoin de gens comme vous dans le parti. Que vous semblerait-il si je vous invitais à quelques réunions de la directive, quand nous abordons le thème de la propagande? Vous pourriez nous donner quelques conseils... et, en même temps, pour pourriez avoir accès à l'une ou l'autre exclusive.
- Cela m'a l'air fantastique -répondit le détective, qui ne pouvait croire à sa chance-. Je serai enchanté de collaborer.
- Nous avons votre adresse. Je vous avertirai par e-mail, espérant que vous soyez disponible au moment signalé.
- Je ferai tout ce qui sera en mon pouvoir pour y assister. C'est bien là mon boulot!