30/08/2011

Les Six - 6.3 (Fin)

De retour à Bruxelles, après avoir supervisé les opérations requises dans le bureau de Zesdeman, Servais ordonna la recherche du pianiste. Lorsque celui-çi lui fut amené, Chardonnais reconnut qu'il prenait régulièrement de l'Attryl. Il en était même si content qu'il en avait augmenté la dose. Il aurait voulu continuer à le faire sans en avertir son médecin, mais comme il était impossible de l'obtenir d'une autre façon, il avait été obligé de visiter chaque fois ce dernier. Comme il avait aussi déclaré qu'il n'avait ressenti aucun effet secondaire, le médecin lui avait de nouveau fourni le remède, et cela à plusieurs reprises. Servais lui demanda quel jour de la semaine il le prenait. C'était son jour libre au club et aussi, comme le policier put vérifier, chaque fois un jour où avaient eu lieu les assassinats.

Il fut mis aux arrêts comme principal suspect pendant qu'on vérifiait ses alibis, de plus en plus vagues lorsque l'on remontait dans le passé. Finalement tous ceux-çi furent détruits et l'ordre fut donné de perquisitionner à son domicile. A première vue, on n'y vit rien qui puisse constituer une piste. Mais l'un des détectives eut l'idée de voir s'il était possible d'ouvrir l'arrière du piano du musicien. Et l'on y trouva toute une galerie photographique: il y avait une photo -sans nul doute prise par lui- de chaque femme assassinée, accompagnée chaque fois d'un article de presse rendant compte du fait et des rares commentaires de la police. Un petit cahier, sans raconter aucun détail des méfaits du mélomane, portait aussi un registre des titulaires de presse et une série de commentaires despectifs sur l'action de la police. L'homme se croyait réellement supérieur et félicitait son médecin pour l'avoir pourvu d'un médicament qui le rendait si efficace pour "se venger des femmes qui l'avaient ridiculisé tout au cours de sa vie".

Une autre surprise fut l'unique livre qui fut trouvé dans sa petite bibliothèque au milieu des ouvrages sur les grands musiciens et de nombreuses partitures: une sorte de résumé de sciences ocultes avec un important chapitre de numérologie et d'interprétation de signes associés aux chiffres. La section sur le numéro six y était marquée par un signet. Et un paragraphe consacré à l'horoscope des personnes nées sous le signe du six y était souligné en rouge. Il indiquait, entre autres, que ces dernières auraient beaucoup de succès à se défaire de leurs ennemis si elles le faisaient "dans l'ombre et de façon intelligente, toujours sous le signe du six". Comme l'avait aussi trouvé l'inspecteur Remy au début de l'enquête, il y avait une marque face au texte qui mentionnait que "si l'on combine le chiffre six avec un cercle, comme lorsqu'une montre marque six heures, il se forme un symbole qui suggère la conclusion de la vie: la roue a fini de tourner".

Comme la police avait constaté sur sa carte d'identité et confirmé au Registre de la Population, Chardonnais était né un 6 juin. Ce qu'il avait toujours considéré comme une date fatidique et, sans nul doute, s'était enthousiasmé avec l'horoscope qu'il avait trouvé.

Mis devant les preuves découvertes par la police, le pianiste finit par avouer qu'il avait tué les deux "miss" et la parlementaire. Et aussi qu'il avait collaboré avec Bonnier pour effectuer le transplant de foie, comme rétribution pour l'aide que ce dernier lui avait prêtée lors du séquestre de la Miss Univers. Comme la police suspectait, il avait connu Bonnier à Paris, où ce dernier avait été le médecin de son père. Lui étant très reconnaissant de ce qu'il avait fait dans les derniers mois de vie de celui-çi, il l'avait aidé à se faire engager au Club 6a6 lorsqu'il avait été expulsé de l'ordre des médecins et quitta la France.

Il fut impossible de lui arracher un aveu pour l'assassinat du juge. Ce crime sortait complètement de sa ligne de conduite et, malgré que la police était convaincue qu'il en était l'auteur, il ne revint jamais sur sa négation.

Les policiers, qui avaient perquisitionné chez le juge, analisèrent tous les documents trouvés dans son coffre fort. Ils furent surpris de voir là que plusieurs grandes enveloppes contenaient des rapports sur de nombreux membres du personnel du club "6 à 6". Et entr'eux, ceux de Chardonnais et de Bonnier. Dans les documents relatifs à Chardonnais, il n'y avait aucune information sur son traitement médical ni sur ses hobbies hors de la musique. Mais la surprise fut plus grande quand, entre les papiers relatifs à Bonnier, ils purent voir que le juge était au courant de son vrai nom et de l'histoire de ses ennuis avec la justice française. Il était parfaitement en condition de le faire chanter.

Trompel fut envoyé interroger Madame Perle à ce sujet. Celle-çi reconnut que le juge était son conseiller juridique et qu'il se chargeait depuis longtemps d'enquêter sur le personnel avant son engagement. Le détective lui demanda ce qu'elle savait des antécédents de Bonnier. Elle reconnut qu'elle savait qu'il était français et avait des connaissances de médecine, ce qui l'avait intéressé et permettait de recourrir à lui quand l'un des clients se sentait mal au club. Mais elle dit ne rien savoir de plus de l'information en possession du juge. Ce dernier lui remettait seulement les renseignements de base et sa recomendation, favorable ou défavorable pour l'engagement.

Servais conclut qu'il était probable que Bonneau ait pu savoir que le juge connaissait tous les détails de sa vie. Peut-être fut-il contacté par lui, dans un essai de chantage, et avait décidé de se défaire de lui, rejettant la faute sur son collègue, dont il devait connaître le jeu. Il fut interrogé à ce sujet mais, tout comme le pianiste, maintint sa négation. Faute de preuves suffisantes, il ne put être jugé pour ce crime.


Epilogue


Le cas "des six" était terminé pour la police. C'était maintenant l'affaire des tribunaux. Trompel remercia le propriétaire des appartements où vivait Bonnier et où il s'était installé pour quelques semaines. Sachant maintenant le rôle du détective dans l'arrestation des assassins, le propriétaire ne voulut pas être payé. Le policier rentra enfin chez lui, où il ressentit à nouveau l'absence de sa femme assassinée. Mais il se rendit aussi tôt compte que l'enquête l'avait aidé à surmonter la peine et éviter la dépression. Il était maintenant en paix. Il avait aidé la justice et pouvait reprendre une vie relativement normale.

Deux mois plus tard avait lieu le procès. Il va sans dire que la sentence fut la plus dure: prison à vie pour Chardonnais, sous le régime le plus strict. Quant à Jean Bonneau, il fut condamné à trente ans de prison, après lesquels il serait remis à la police française pour le cas de violation de mineure dans ce pays. Il passerait aussi le reste de sa vie en prison.
Mosnieur van der Helst reçut aussi plusieurs années de prison pour trafic d'organe et son médecin dut payer une forte amende et reçut une admonestation de la justice et du collège des médecins pour son manque de contrôle de l'origine de l'organe transplanté.
Le Club "De 6 à 6" fut définitivement fermé et, pour son trafic, Madame Perle reçut cinq ans d'arrestation domiciliaire surveillée.


LA SEMAINE PROCHAINE: "LES VACANCES DE TROMPEL"

23/08/2011

Les Six - 6.2

Une semaine plus tard, Servais trouvait un message sur son bureau. Il disait "J'ai une information inportante pour vous. Retrouvons nous à la dernière file du cinéma Métropole à dix-huit heures. Je ne veux pas qu'on me voie dans des locaux de la police. Dr.Félicien Demarteau".
- A six heures -murmura Servais-. Ce sera en relation à ce cas d'assassinats? J'espère que ce ne sera pas une mauvaise blague.
Il chercha le nom de Demarteau dans le guide téléphonique sur internet. Il y avait efectivement un docteur Félicien Demarteau, qui apparaissait comme neurologue. Il irait au rendez-vous.

A six heures, donc, il entrait au Métropole, à la rue Neuve, la rue commerciale la plus importante de Bruxelles. Il y avait peu de gens dans les dernières files du cinéma. Comme il ne connaissais pas son interlocuteur, il s'assit seul dans une zone vide de la dernière file. Après quelques minutes, un des autres spectateurs du fond de la salle s'assit à son côté.
- Comissaire Servais?
- Oui.
- Je suis le docteur Demarteau. Puis-je voir votre identification?
- Si vous arrivez à voir quelque chose ici!
- La lumière du film me semble suffisante. C'est bien -ajouta-t'il après avoir vu la plaque-. Excusez-moi, mais je ne voudrais pas que ce j'ai à dire tombe dans un ouïe incorrecte. L'affaire est trop grave et je n'ai pas de preuve définitive.
- De quoi s'agit-il?
- Des assassinats en série signalés avec le numéro six. Ce que je vais vous dire pourrait être une simple coïncidence, mais je le doute. Comme aussi, sans doute, d'autres médecins, j'ai été élu par l'entreprise pharmaceutique Zespharma pour essayer un nouveau médicament contre la dépression. Ils m'ont demandé de choisir six patients qui ne fussent pas des cas trop graves et m'ont envoyé les doses nécessaires pour un traitement-type, avec les études qui démontrent sa valeur. Tout est en ordre: les tests sur animaux ont été favorables et ils ont été autorisés pour commencer l'expérimentation sur les humains. Je dois suivre les cas de tres près et les informer de n'importe quel effet adverse. Comme les remèdes se donnent gratuitement, j'ai choisi des patients qui pouvaient avoir difficile à payer le traitement que je leur indiquerais avec le médicament traditionnel -très cher- et qui serait avantageusement remplacé par ce nouveau.
- Je suppose qu'il n'y aurait rien d'anormal à cela, mais que vous avez découvert un grave défaut, sinon nous ne parlerions pas ici.
- En effet. Deux de mes six patients ont démontré progressivement une forte augmentation de leur agressivité les jours où ils prennent le remède, une fois par semaine. L'un d'eux l'avait pris le jour de la consultation et en arriva à m'agresser, après avoir parlé la peste des médecins. Un autre ne présentait pas de symptôme à la consultation mais m'a raconté que, le jour où il prenait le médicament, il sentait une forte aversion pour les femmes.
- Vous aurez averti le fabricant, je suppose?
- Bien sûr. Et j'ai remplacé le médicament de ces patients. Mais la firme ne m'a pas répondu et continue à m'envoyer les échantillons, ce qui m'ennuye beaucoup. J'ai donc pensé que deux plus deux font quatre ou, dans ce cas, six plus six. Considérez ce qui suit et dites moi si c'est seulement une coïncidence: l'entreprise s'appelle Zespharma et zes signifie six; ensuite on me demande de choisir six patients, me disent qu'ils feront partie d'un premier groupe de trente-six sujets, soit six patients de six médecins. Finalement, un de mes patients acquiert le désir d'agresser les femmes et un autre a été près de me tuer. Qu'est-ce que cela vous dit?
- C'est très perturbateur, en effet. Je suppose que vous ne me révèlerez pas le nom de ces deux patients.
- Vous devez savoir que le secret professionnel me l'interdit.
- Vous avez raison, mais c'était aussi mon obligation de le demander. Je crois que cette entreprise mérite une enquête. Vous témoigneriez contre elle?
- Seulement si vous découvrez des preuves qui complètent mon témoignage. En cas contraire, je préfèrerais ne pas m'en faire une ennemie. C'est une firme importante et, jusqu'à présent, je n'avais aucun problème avec elle.
- Cette condition me semble valable. Quel est le nom du médicament?
- Attryl.
- Bien. Je verai si nous pouvons découvrir quelque chose de plus. Vous connaissez le nom des autres médecins? Vous en avez contacté?
- Impossible. Ce type de test se fait de façon très réservée et il est indispensable que les rapports soient totalement indépendants.
- Je ne vois pas d'autre question à vous poser. Je vous remercie de cette information. Si vous n'avez rien d'autre à ajouter, je vous laisse. J'ai trouvé votre adresse et téléphone dans le botin: je vous appelerai si j'ai du neuf. Au revoir!

Le lendemain, à la première heure, Servais fit chercher l'adresse de Zespharma et qui était son directeur, président ou gérent. Il recevait peu après l'information demandée: le directeur-gérent et propriétaire était Marcel Zesdeman. La firme avait ses bureaux et laboratoires à Malines et avait environ quatre-vingt employés.
Il demanda aussi les rapports scientifiques sur la drogue Attryl. On l'informa que cette dernière n'avait pas encore été acceptée par la FDA américaine, qui était en pratique le leadership en matière d'approbation de médicaments. Cependant, en Belgique, les premiers tests sur des patients réels avaient été autorisés six mois plus tôt, c'est-à-dire quelques semaines avant le début de la série d'assassinats.

Le lendemain:
- Chef, vous n'allez pas croire qui ce sont présentés hier soir au club "6 à 6": pas moins que le bourgmestre de Peer accompagné du gérent d'une firme pharmaceutique qui vit dans sa commune. Ce bourgmestre aura quelque chose à voir avec les crimes? L'une des filles a été trouvée là!
- Tu crois qu'il serait si bête pour la laisser dans sa propre ville? Mais dis-moi qui était le pharmacien.
- Il s'appele Louis Vermeulen. Comme il vit aussi à Peer, cela peut expliquer qu'ils arrivent ensemble. Je l'ai vérifié: aucun n'a d'antécédents policiers et aucun n'apparait avec son nom dans les registres de madame Perle.
- Et à quelle entreprise travaille-t'il? A Zespharma, par hasard?
- Exact. Comment l'avez-vous su?
- J'ai mes sources. Bien que je ne m'attendais pas à découvrir une relation entre Zespharma et notre club, il me semble qu'il peut bien y avoir une relation avec les assassinats. Une question de drogues dangereuses.

Servais fit alors demander au bureau d'Anvers d'aller interroger le bourgmestre de Peer, mais celui-çi, à part de reconnaître qu'il allait de temps en temps au club 6a6, put donner un alibi pour plusieurs des dates d'assassinats, lesquels furent confirmés par la PJ.

Le lendemain, il décida d'aller lui-même à Zespharma après midi et d'interroger par surprise le propriétaire. Etait-ce une autre cincidence? Son nom, Zesdeman, signifiait "le sixième homme". Le nom de la compagnie provenait sans nul doute de son propre nom.
Ainsi, vers trois heures, après une demi-heure de voiture par l'ancienne route provinciale, il était à Malines, Léopoldstraat, près de la Schuttersvest, où il stationna, devant l'édifice de Zespharma. Son attention fut attirée de suite para le logotype de la firme: un cercle traversé par un diamètre vertical, comme une montre à six heures. Et comme sur les femmes assassinées!
Il entra et montra sa plaque de police à la réceptionniste, lui disant qu'il lui fallait parler au plus tôt avec monsieur Zesdeman pour une affaire de la plus haute importance. La secrétaire lui répondit qu'elle devait avertir "le grand patron".
- Son téléphone ne répond pas. Mais je suis sûre qu'il est là, car il m'a signé des documents il y a une demi-heure et n'est pas sorti. Je vais aller voir.
- Je vous suis -dit Servais, qui ne voulait pas de réponse négative.

La secrétaire ouvrit la porte du bureau et se dirigea vers la table, derrière laquelle était son chef.
- Monsieur... -commença-t'elle à dire, mais s'interrompit en voyant sa tête inclinée sur sa poitrine et les bras ballants.
- Il lui estaa rrivé quelque chose -dit-elle au policier.

Celui-çi, qui reconnut immédiatement la scène, l'empêcha d'avancer et lui ordonna de retourner à son poste.
- Je me charge de ce qui se passe ici. Attendez-moi dehors. Je vous dirai que faire.

Il s'approcha alors et vit clairement que quelque chose sortait de la poitrine, quelque chose qui avait servi de poignard, et un petit fil de sang. Le coup dut percer directement le coeur et l'hémorragie avait été principalement interne. Derrière le fauteuil, il y avait une grande horloge murale... où manquait l'aiguille des minutes. L'homme s'était suicidé ou avait été tué avec elle.

Servais regarda alors la surface du bureau et découvrit que c'était en réalité un grand écran OLED, sûrement de réponse tactile. Sur lui se déplaçait lentement, d'un côté à l'autre, le logotype de la firme. Il se mit des gants et toucha l'écran. Le logotype disparut aussitôt et, à sa place, apparut un message en grandes lettres: "L'Attryl est un échec total. Il doit être retiré. Nous sommes ruinés."

Ainsi, le docteur Demarteau avait raison. Zesdemand avait dû accumuler d'autres rapports négatifs et les avait peut-être liés aux crimes. Et il ne put le supporter. Il interrogea ensuite le gérent et, sous menace d'un procès pour complicité d'assassinat, obtint les noms des six médecins et les dossiers des trente-six patients. Entre eux, il reconnut le nom d'un des employés du club "6 à 6": Michel Chardonnais, le pianiste.

16/08/2011

Les Six - 6.1


Chapitre 6. Victimes masculines

Le lundi 8, Servais trouva sur son ordinateur, dans la page de résumé interne des faits du week-end, un rapport sur une femme agressée à la Forêt de Soignes, à Overijse. Il s'agissait d'une tentative de violation qui n'avait pas réussi, ayant été interrompue par des gendarmes à cheval qui promenaient par là leurs bêtes. Mais l'agresseur avait pu s'échapper.

Anne Jacobs venait d'une fête de mariage qui s'était célébrée dans un local de Notre-Dame au Bois. Elle fut abordée quand elle allait monter dans sa voiture, dans un parking au bord du bois. Elle avait commis l'erreur de sortir seule, voulant rentrer tôt chez elle suite à un fort mal aux dents. Le bandit l'avait menacée d'un couteau. Il portait un passe-montagne mais était vêtu d'étiquette, ce qui faisait penser qu'il venait de la même fête. Il la poussa dans le bois, lui disant que "Maintenant tu vas être à moi pour toujours. Ce sera ta meilleure expérience. Le plaisir suprême. Tu ne seras de personne d'autre." Il lui coupa la robe, mais dut garder le couteau pour tenter de la violer. Elle s'était mise à crier et ce fut à ce moment qu'arrivèrent les gendarmes qui se prmenaient assez près. Le violateur réussit à se faufiler entre les voitures stationnées, où les animaux ne pouvaient pas le suivre.

Servais envoya demander la liste des assistants au mariage et demander les séquences de vidéo qui avaient été prises, pour observer les invités. Ainsi, les policiers y reconnurent plusieurs personnes qui visitaient ou travaillaient au club "6 à 6", dont plusieurs hommes qui répondaient à la description -partielle- faite par la victime. La coïncidence éveilla leur attention mais, évidemment, ne signifiait rien en elle seule.

Le comissaire appela les hommes qui avaient surveillé le pianiste du club durant le week-end et demanda leur rapport.
- Chef, le samedi il nous a échappé alors qu'il assistait à un mariage. Il y a eu un grand désordre quand les gens sont sortis de l'église et nous ne l'avons plus vu.
- C'était où?
- A l'église de Notre-Dame au Bois, à Overijse.

Servais en fit la conclusion: le pianiste, le samedi 6 et une tentative de violation. Ce serait la cinquième victime de la série? Il demanda le rapport complet de l'interrogatoire de la femme et, après l'avoir lu, le remit à Trompel et l'envoya à l'hôpital pour l'interroger à nouveau, principalement au sujet de son éventuelle relation avec le club. Mais le détective eut une surprise: elle en était partie, à l'encontre de l'avis du médecin. Il s'en fut alors au domicile qu'elle avait donné, mais personne ne lui ouvrit.

Le lendemain, Remi arriva en courant au bureau du comissaire.
- Chef, vous n'allez pas le croire! La femme du bois est chez le juge Dedeuvel et informe que celui-çi a été assassiné.
- Et Dedeuvel était client du 6 à 6, si je ne me trompe.
- En effet. Qu'est-ce qu'elle pouvait bien faire là?
- Nous le lui demanderons. Allez enquêter là avec Jef Trompel.

Anne Jacobs leur ouvrit la porte quand ils arrivèrent chez le juge avec les techniciens. Les questions ne furent pas nécessaires: elle leur explica d'emblée qu'elle était là parce que le juge était son oncle et qu'il avait pensé qu'elle serait plus en sécurité avec lui, qui pouvait de plus la conseiller légalement. Quand elle était descendue pour préparer le petit-déjeûner, elle avait trouvé son oncle à terre dans le living. Elle indica l'entrée de cette pièce aux policiers, mais ne voulut pas les y accompagner.

Le juge avait la chemise ouverte et le signe theta gravé sur le torse. Il avait clairement été étranglé avec une corde très fine, qu'ils ne trouvèrent pas. Le corps était froid et le thermomètre permit d'établir qu'il avait été tué vers minuit.

Un homme marqué du "6" était une nouveauté. Mais, en réalité, il n'y avait eu que deux femmes avec ce même tatouage au même endroit. Les autres femmes agressées pouvaient être ou ne pas être liées au même assassin. Mais toutes les victimes étranglées l'avaient été de la même façon avec quelque chose comme un fil de pêche... ou une corde de piano.

La femme assura qu'elle n'avait rien entendu. Elle s'était couchée vers onze heures et avait pris des pilules pour dormir, suite aux douleurs et à l'angoisse dont elle souffrait. Trompel la questionna au sujet de l'agression qu'elle avait souffert et de sa présence à la fête de mariage. Elle avait été compagne d'études de la mariée et c'était la raison de son assistance. Elle dit aussi ne pas connaître le club "6 à 6", mais Trompel eut l'impression de ce que c'était un mensonge.

Les techniciens vérifiquèrent que la serrure de la porte de rue avait été forcée, mais ne trouvèrent aucune empreinte digitale. Ce serait un autre cas de difficile solution.

09/08/2011

Les Six - 5.3


La police de Louvain avait enfin pu parler avec le médecin de van der Helst. Celui-çi voulut d'abord utiliser le secret professionnel pour refuser de répondre aux questions. Mais quand il fut accusé de complicité dans le trafic d'organes et d'un cas d'assassinat, il finit par confesser qu'il avait accepté l'arrangement que lui avait proposé son patient: ce dernier se procurerait un organe hors du circuit officiel et le médecin ne poserait pas de questions. Pour cela, il avait reçu des honoraires extraordinaires. Mais il lui était impossible d'informer sur l'origine de l'organe. Le seul qui savait la vérité était son patient.

Au reçu de cette information, Servais envoya Trompel à la clinique. Il devait interroger van der Helst et aussi les infirmières. Au moins une de celles-çi devait pouvoir reconnaître la personne qui avait apporté le foie. A la garde, grâce à l'autorisation du chirurgien, le détective put s'informer de quelles infirmières étaient présentes lors de l'arrivée du transplant et laquelle avait été chargée des formalités. Il eut la chance de ce qu'elle était présente et lui demanda qui l'avait apporté.
- Je ne sais pas qui c'était. Le docteur m'avait averti de l'arrivée et que le lui envoyait un collègue d'un autre hôpital. Monsieur van der Helst n'était pas sur la liste prioritaire, mais les patients reçoivent parfois des donations privées, généralement d'un membre de la famille, bien que d'habitude l'extraction se fait ici.
- Cela ne vous a pas paru anormal?
- Non, parce que -comme je vous l'ai dit- c'est une règle générale mais pas absolue. Le donateur, parfois, ne peut être transporté, pour une raison ou une autre, et cela ne peut empêcher le processus. Il s'agit de sauver une vie.
- Et il n'y eut rien d'anormal lors de la remise?
- Rien. L'infirmier qui est venu le remit dans les conditions adéquates, selon le protocole.
- Ce fut une de ces personnes? -demanda Trompel en montrant les photos de Bonnier, Chardonnais et d'autres membres et clients du "6 à 6".
- C'est celui-là -dit-elle, en montrant Bonnier-. Qui est-ce?
- Je ne peux pas vous donner cette information, je regrette. Mais c'est très important pour nous. Merci! Je peux voir maintenant monsieur van der Helst?
- Il n'y a pas d'inconvénient. Il est dans la suite 206.
- "Un autre 6", pensa Trompel, en se dirigeant vers la chambre.

Quand il s'y présenta comme policier, il se rendit compte que le patient s'inquiétait. Apres lui avoir demandé comment il se sentait, il aborda la thème plus épineux de sa visite.
- Je sais que monsieur Bonnier est venu vous voir. Vous le connaissez depuis longtemps?
- Depuis environ dix ans, il me semble.
- Alors vous l'avez connu en France.
- Oui.
- Il était votre médecin là-bas?
- Seulement un ami.
- Alors vous devez savoir qu'il ne s'appele pas Jean Bonnier mais Jean Bonneau. Et qu'il était médecin-chirurgien. C'est pour cela que vous vous êtes mis d'accord avec lui et vous l'avez payé pour vous procurer un nouveau foie, n'est-ce pas?

L'homme resta muet.
- Vous savez que nous pouvons vous juger pour trafic d'organe? Et, de plus, comme complice d'assassinat?
- Comment serait-ce possible? Je n'ai rien à voir avec aucun homicide! J'étais ici, et en état grave!
- La personne qui vous a donné son foie a été tuée pour vous le donner.
- Ce n'est pas possible! Je n'ai jamais demandé cela!
- Mais c'est Jean Bonneau qui vous l'a procuré, n'est-ce pas?
- Oui. Il m'a dit qu'il pouvait m'en procurer un et qu'il me l'apporterait.
- C'est tout ce que nous voulons savoir pour le moment. Merci, monsieur van der Helst. Quand vous irez mieux, vous devrez prêter un témoignage officiel. Entretemps, vous ne pouvez pas abandonner le pays et, si vous quittez cette clinique, vous devrez notifier la PJ de votre nouvelle résidence.

Il restait une question: comment Bonnier savait-il que Florence Cloquet était compatible? Elle travaillait à Air France et passait de ce fait beaucoup de temps à Paris. Elle pouvait y avoir connu Bonneau. Il comenta cela à son chef et celui-çi demanda à la police française de visiter la clinique où avait travaillé le dcoteur Bonneau et de vérifier s'il y avait eu contact avec une patiente nommée Florence Cloquet. Et, dans ce cas, d'obtenir et d'envoyer l'histoire médicale de la défunte.

02/08/2011

Les Six - 5.2

Quand ils se réunirent, Servais interpela Trompel pour son enquête particulière, puisqu'il lui avait enjoint de se maintenir en marge.
- J'ai été surtout fort surpris, lorsque je t'ai téléphoné, de savoir que tu étais justement à Louvain -lui dit-il-, parce que tu n'étais pas au courant du dernier cas, dont l'enquête nous mène justement là.
- Cherf, je ne pouvais pas rester tranquile. Aux funérailles j'ai reçu un renseignement sur un possible suspect et il valait la peine de le vérifier. Je ne sais pas si l'homme désigné est lié au cas ou pas, mais il y avait des indices que je ne pouvais pas laisser de côté bien que, si j'étais en service actif, je les aurais peut-être archivés.

Il raconta alors ce qui lui avait été dit et tout ce qu'il avait pu découvrir au sujet de Bonnier.
- Le fait que ce Bonnier ait été visiter un patient à la clinique Saint Raphael, ajouté à ce que tu sais et ce que nous savons, lui confère sans aucun doute la condition de suspect. Nous confirmerons s'il a été visiter le transplanté et nous tâcherons de savoir pourquoi -conclut Servais, qui relata alors les autres détails des différents cas qui n'étaient pas apparus dans la presse, pour que Trompel soit au courant de tout.
- Jef ajouta-t'il-, tu as une habilité particulière pour analyser les cas et, si je ne me trompe pas, tu caches aussi une application spéciales dans ton ordinateur. Tu pourrais nous donner un coup de main avec l'analyse. C'est pourquoi j'ai décidé de te mettre au courant de tout et de te réincoprporer, mais exclusivement pour du travail de bureau.

Apr}es la réunion, trompel s'en fut chercher son portable, où il avait enregistré tous les détails des assassinats qu'il connaissait ainsi que les résultats de ses filatures de Bonnier. Il travailla plusieurs heures pour ajouter à sa base de données les antécédents pris dans les rapports que lui donna son chef.

Le lendemain, en arrivant de nouveau à son bureau, il mit en marche son logiciel de "minerie de données", qui lui servait pour extraire des conclusions ou, tout au moins, signaler des cohérences et incohérences. Il imprima les résultats et, avec eux, s'en fut trouver Servais.

- Mon analyse marque que quelques données pouraient être tres importantes, en plus, évidemment, du numéro six. Ainsi, par exemple, il existe au moins deux cas dans lesquels l'assassin a dû avoir un complice: celui de la miss Univers et celui du transplanté. Dans le premier, il y a eu deux personnes qui entrèrent et sortirent de l'hôtel avec la civière. Dans le second, il dut y avoir quelque chose de semblable et une des deux personnes a d[u être un chirurgien. Dans les deux cas, il a fallu utiliser une ambulance, au moins pour porter le foie à la clinique de Louvain. Ils l'ont même peut-être extrait dans l'ambulance.
Et il y a un autre détail qui attire mon attention. C'est peut-être une coïncidence, mais cela pourrait aussi être un indice: dans la liste du personnel du club, il y a un pianiste et sa date de naissance est le 6 juin 1966, c'est-à-dire 6-6-66. De plus, son adresse est le 6 de la rue Moris, dans la commune de Saint-Gilles, dont le secteur postal est aussi le 6.
- Cela attire vraiment l'attention -convint Servais-, mais n'est pas une piste très solide. Nous n'avons pour le moment rien qui pointe vers cette personne. Bien que, au point où nous en sommes, nous ne perderions rien à enquêter sur lui.
- Et le fait que Bonnier travaille aussi au même club. Cela nous donne deux personnes en étroit contact. Il nous manquerait de savoir s'ils eurent les mêmes jours libres. Et si l'un des deux a fait des études de médecine. Cela serait cohérent avec la personnalité du criminel. Selon son analyse psychologique, il se sent avoir du pouvoir en somettant ses victimes alors que dans sa vie courante il n'en a aucun. Cela serait aussi cohérent s'il a dû abandonner la profession médicale. Il n'aimerait pas avoir perdu son pouvoir sur la vie des autres. Il ne se sent libre et puissant que sous le signe du six. Il souffre une névrose qui lui fait appeler à la magie pour être plus sûr.
- Alors, nous avons deux suspects, du même club: Bonnier et le pianiste. Vérifions leurs jours de sortie. Nous amènerons ici Bonnier pour qu'il nous explique ce qui le lie au patient transplanté. On vient en effet de me confirmer que c'est lui qu'il est allé voir: ce fut la seule personne qui s'est présentée à l'heure que tu as signalée. Quant au pianiste, Michel Chardonnais, nous le surveillerons et nous l'amènerons peut-être après. Ce qui nous manque encore, pour le moment, c'est aussi le témoignage du médecin qui a implanté le foie.
- Mais si Bonnier est impliqué, il m'a échappé à un certain moment. Je l'ai suivi tous ses jours libres.
- Mais les crimes eurent lieu la nuit. Tu ne l'as peut-être pas entendu sortir et il t'a échappé.
- D'accord. C'est un fait que je ne pouvais le surveiller jour et nuit.

Servais se chargea immédiatement d'interroger Bonnier quand on l'amena. Trompel ne devait pas se monter, pour éviter d'être reconnu. Pendant qu'on amenait l'homme au comissariat, le détective entra dans son appartement pour l'inspecter. Il envoyait immédiatement ses observations à Servais par message de texte, de telle façon que le comissaire puisse utiliser cette information dans son interrogatoire.

- Qu'êtes-vous allé faire à la Clinique Saint-Raphael?
- J'ai été visiter mon ami Lodewijk van der Helst, qui avait été opéré.
- Il a reçu un nouveau foie, n'est-ce pas?
- Oui, c'est cela.
- De qui est ce foie?
- Comment puis-je le savoir? Les donneurs sont toujours anonymes.
- Il nous semble que vous pourriez le savoir. Mardi passé était votre jour de sortie, n'est-ce pas?
- Comme toujours.
- Vous avez rencontré quelqu'un d'autre? De nuit, par exemple?
- Pourquoi cette question?
- Vous connaissiez Florence Cloquet?
- Pas du tout. Qui est-ce?
- Et pourquoi avez-vous sa photo chez vous? -put demander le policier, qui venait de recevoir un message de texte de Trompel lui signalant ce fait.
- J'ai sa photo?
- En effet. Et aussi celles de la miss Univers et de la miss 17. Vous aimez les jolies femmes, n'est-ce pas?
- Bien sûr que je les aime. Pas vous? Qu'y a-t'il de mal à cela?
- Et vous aimez de les poursuivre aussi au Bois de la Cambre.
- Les poursuivre?
- Nous connaissons votre débilité. Ne la niez pas. La nuit de mardi, vous avez abordé Florence Cloquet quand elle est sortie de l'aéroport. Vous l'avez faite nonter dans un véhicule, vous l'avez tuée et enlevé son foie, n'est-ce pas?
- Je n'ai pas touché cette femme! je ne sais pas qui c'est!
- C'est ce que nous allons vérifier! Voulez-vous nous donner un échantillon d'ADN? Il nous suffira de vous passer un peu de cotton dans la bouche. Si vous ne l'avez pas touchée, vous serez libre de doute.
- Enchanté! Je n'ai rien à voir avec cela et, de cette façon, je vous le prouverai.

Après qu'ait été pris l'échantillon, Bonnier fut envoyé à une cellule, où il devrait attendre le résultat de l'analyse. On vérifia aussi ses antécédentes: il n'en avait pas dans le système judiciaire belge. Mais comme il avait la nationalité française, on alerta la police de ce pays au travers d'Interpol. Quelques heures plus tard arrivaient les informations demandées et aussi d'autres qui signalaient que les autorités de la ligne aérienne avaient porté plainte à Interpol-Paris pour la disparition de leur hôtesse de l'air.

Deux jours plus tard, Bonnier fut amené de nouveau devant Servais.
- Nous avons les résultats de l'analyse d'ADN.
- Alors vous savez que j'avais raison. Je ne connaissais pas cette femme et n'ais rien à voir avec ce crime.
- Ceci n'est pas confirmé. Sans aucun doute, vous avez utilisé des gants de latex et une autre personne a soumis la femme. Mais vous l'avez opérée et avez porté son foie à Louvain, pour monsieur van der Helst.
- Vous vous trompez. Je ne la connais pas te ne l'ai pas touchée. J'ai seulement une photo d'elle.
- Nous savons que vous vous appelez en réalité Jean Bonneau, un nom qui -évidemment- ne vous plait pas. Vous avez été condamné en France pour pédophilie et avez perdu votre licence de médecin-chirurgien. Mais il y a plis grave: votre ADN a été trouvé chez une fillette de neuf ans violée il y trois ans. Nous ne savions pas a qui appartenait cet ADN jusqu'à analyser le vôtre. Si vous n'avez pas de relation avec les crimes d'ici, vous l'avez avec cette violation d'une mineure. Cette fois, vous n'échapperez pas de la justice! Et cela vous coûtera une bonne quantité d'années de prison. Plus encore si vous avez participé aux crimes des Six.