21/09/2010

La conspiration 6.6.

Après avoir téléphoné à son chef, le détective se mit à préparer un nouvel article pour le journal. Il avait l'habitude de réunir des informations et de dactylographier ses rapports avec un vieil ordinateur Apple qu'il possédait depuis qu'il avait rédigé sa thèse de licence de l'université. Il l'utilisait presque exclusivement pour cela et pour voir son courriel du fait qu'il faisait à son bureau et sur l'ordinateur de la police tout ce qui était strictement policier. Ce jour-là, alors qu'il rédigeait le nouvel article, il commença à se sentir malade. Il téléphona au service d'urgence et une ambulance vint le chercher. Il perdit connaissance à peine à bord. Il avait eu le temps de montrer sa carte de police et son chef fut averti lorsqu'il arriva à l'hôpital.

Il se réveilla le jour suivant dans un lit de l'unité de soins intensifs de l'hôpital Saint-Pierre. Le médecin, qui le visita peu après, l'informa de ce qu'il avait été empoisonné et qu'il s'était sauvé uniquement grâce à avoir appelé immédiatement l'ambulance et avoir reçu les soins à temps. On avait pu établir que le poison lui était entré au travers de la peau et ses collègues, avertis, révisaient son appartement à le recherche de traces du poison. Après deux ou trois jours de traitement à l'hôpital, il pourrait reprendre ses activités et sa vie normale.

Quelques heures plus tard, Servais venait le visiter.
- Tu t'es sauvé presque par miracle -lui dit-il-. On a utilisé un poison très rare et très puissant. Les techniciens l'ont trouvé sur les touches de ton ordinateur. Il faudra que tu changes son clavier. Ton ordinateur est si vieux que tu ferais même mieux de le changer complètement: le plus probable est qu'il n'y ait pas de pièces de rechange. Et personne ne devrait le toucher sans la plus grande précaution.
- Il m'a été fidèle durant des années: il m'accompagne depuis que je suis sorti de l'université.
- C'est bien pourquoi il serait temps que tu le changes. De toutes façon il tombera en panne d'un moment à l'autre.
- Et on a trouvé une piste chez moi? Des empreintes digitales? Un inconnu qu'on a vu entrer?
- L'administrateur dit qu'un inconnu a demandé après toi quand tu n'étais pas là puis est parti. Il pourrait être revenu sans être vu, vu que l'administrateur n'est pas tout le temps face à l'entrée. Nous avons sa description. Mais il n'y avait pas d'empreintes chez toi, ce qui était à attendre vu le souvenir qu'on t'a laissé. Et il a dû avoir un de ces petits appareils spéciaux pour ouvrir la serrure Yale.
- C'était donc un professionnel. Et nous ne pourrons pas le trouver.
- Cela me semble évident. Mais cela veut dire que tu ennuyes quelqu'un et que tu t'approches de quelque chose d'important.
- Si important que c'est la deuxième fois qu'on tente de me tuer.
- Et peut-être qu'il ont découvert que tu es policier ou, tout au moins, un informant. Officiellement, nous communiquerons ta mort, pour qu'ils ne le tentent plus de nouveau. Il vaudra donc mieux que tu abandonnes ta façade de journaliste et, quand tu sortiras d'ici, ne retournes pas chez toi et change d'aspect. Je t'enverrai un maquilleur.
- D'accord.
- Entre temps, comme tu as le temps de penser, essaye de résumer tout ce que tu sais et de faire croiser les pistes. A propos, Interpol nous a envoyé l'information sur l'homme qui a été écrasé en tentant de te pousser sous le camion. La police allemande a découvert qu'il avait été agent de la STASI, la police secrète de l'ancienne Allemagne Démocratique. Et il en va de même du motocycliste qui a attenté contre l'aide de camp de Burlet.
- Des ex-agents communistes! Peut-être qu'ils sont liés à cet Oblensky que rencontre Bertrand et qui peut avoir été un agent de la KGB. Il me semble que nous sommes en train de compléter le puzzle. Et vous n'avez rien pu tirer de ce motocycliste?
- Les médecins nous ont empêché de l'interroger pendant plusieurs jours. Après, il est resté muet comme une tombe. Et il n'est pas encore en condition de souffrir des pressions.
- Si Oblensky contrôle les assassins, Bertrand pourrait aussi être impliqué. Unit cela avec ce qui apparait sur le compte du groupe "République belge" de Facebook et son blog, où ils célèbrent les attaques contre les aristocrates. Bertrand et Oblensky pourraient être derrière ceux-çi...
- Ce qui impliquerait que tout soit une stratégie du PNI: attaquer physiquement autant que verbalement et créer ainsi une alarme publique pour réunir des voix en faveur de son projet de législation beaucoup plus dure et d'état policier. Tu as raison: tout cela semble avoir un sens. Prépare une bonne analyse. Je tâcherai de réunir plus de preuves et nous enverrons cela à la DST. Il nous faut unir nos forces pour mettre ces conspirateurs en évidence et déjouer leurs plans.
- Dommage que pour le moment il s'agisse seulement d'une bonne hypothèse de travail et que nous ne pouvons pas encore les arrêter.
- Nous fermerons peu à peu l'étau. Et nous pouvons avoir un coup de chance. Au train où vont les choses, nous en avons besoin: leurs précautions sont réellement efficaces.

14/09/2010

La conspiration 6.5.

Le lendemain, Trompel rendit compte au commissaire Servais que ce qu'il avait appris. L'ex-général Bertrand avait donc été le responsable de la fausse accusation contre la gendarmerie. Cela s'ajoutait aux autres antécédents déjà accumulés par la PJ et la DST. Bertrand était un suspect qui gagnait chaque jour en importance, surtout suite à ses rencontres avec Oblensky. Mais les réunions chez lui avec Durand -maintenant un financier confirmé du PNI- et d'autres magnats donnaient l'idée d'une superstructure qui maniait en coulisse les fils de ce parti.

Servais avait aussi des nouveautés à lui communiquer. Il avait reçu en leur temps les rapports sur les attentats contre les ambassadeurs belges à l'étranger et il avait demandé de lui envoyer les fragments des bombes qui purent être trouvés. Cela avait pris du temps car les laboratoires des pays des faits, les uns plus minucieux que les autres, avaient dû les chercher et les étudier d'abord et, dans certains cas, obtenir une autorisation judiciaire pour les envoyer en Belgique. Mais ils étaient finalement arrivés et avaient été comparés. Dans tous les cas, le matériel explosif était du même type de "plastic" et on avait découvert des composants d'un appareil de radio-fréquence, ce qui avait poussé les policiers locaux à croire à une mise à feu à distance. Mais un des techniciens belges eut l'idée d'unir les fragments des divers appareils et fit une découverte surprenante: il ne s'agissait pas d'un simple récepteur, mais d'un émetteur-récepteur, du type utilisé pour lire les étiquettes de radiofréquence "RFID". Et tous les ambassadeurs portaient le nouveau passeport avec ce type de puce. On savait que le sénateur de Croix d'Heuchin portait aussi son passeport quand le tua la bombe. C'est ce qui donna au technicien l'idée que cela pouvait être l'élément commun. Et il eut la chance d'avoir accès à la plus grande quantité de fragments, vu que la PJ avait analysé ce dernier cas depuis le début.

Ainsi donc, les victimes avaient été identifiées par leur passeport et c'est ce dernier qui avait servi de détonateur. [Des études techniques ont démontré la factibilité de ce système au point que sur Internet circulent des vidéos qui le démontrent.] Un système si sophistiqué exigeait un programmateur expert et aussi l'accès de quelqu'un aux données contenues dans l'étiquette. Il devait donc y avoir quelqu'un avec accès au Registre Civil belge qui avait filtré ces données. Une preuve claire de conspiration de haut niveau.

Servais suggéra ainsi à Trompel de préparer un article pour son journal sur les puces RFID et leur sécurité, révélant ce que la police belge avait découvert. L'article fut publié deux jours plus tard, rendant encore plus furieux le général Bertrand. Bien que la police ne le savait pas, c'était celui-çi qui avait obtenu l'information du registre Civil.