14. (Mardi; 16e jour)
Le lendemain, Servais se mit à voir le matériel reçu de Rosenwald. Il y avait une liste de villes où Globalteck avait "fait des affaires" et d'équipements qu'ils avaient acheté, comme aussi de disparitions et accidents suspects de personnes qui avaient eu contact avec eux. Mais rien de cela n'aidait la police belge. Il devait faire autre chose: interroger Alex Lorand, le jeune homme qui avait aidé Rosenwald à séquestrer Joséphine Mousin. Il marqua sur son téléphone le numéro que l'agent de la CIA lui avait donné et lui demanda de se présenter à la PJ. Quand il arriva, il l'interrogea accompagné de Trompel, mais ne put augmenter l'information dont il disposait déjà.
- Ils m'appelèrent par téléphone et je ne sais pas comment ils ont obtenu mon numéro ni comment ils ont su que j'étais ami de Joséphine. Ils m'ont dit qu'ils avaient besoin de lui parler en privé, sans que son père le sache. Je devais seulement prendre et emmener la personne qui l'interrogerait, et l'inviter à monter dans ma voiture. Ils m'assurèrent que rien ne se passerait et qu'ils me payeraient mille euros. Vu la somme et l'assurance de ce que rien ne lui arriverait, je n'ai pu m'y résister. Mais j'ai été effrayé quand cet homme lui mit du chloroforme. Il m'assura de nouveau que rien ne lui arriverait et exigea que je les accompagne à l'hôtel où il l'interrogerait. Je suis rentré chez moi apès l'avoir laissée dans sa chambre. Et quelques heures plus tard l'argent était abonné à mon compte.
- De quelle banque?
- De l'ABN AMRO.
- Vous avez les données de l'origine du transfert?
- C'est d'un compte de cette même banque mais hors du pays.
Peut-être qu'un ordre judiciaire pour la banque pourrait obtenir plus d'information, mais il ne serait pas facile de l'obtenir. Joséphine Mousin n'avait pas voulu faire un procès à son ami, bien qu'elle avait décidé de couper toute relation avec lui. L'ABN AMRO a des succursales dans plusieurs pays d'Europe et d'Asie, ainsi que dans les îles Jersey et Guernesey, et à Curaçao. Sans doute les succursales des îles pouvaient servir pour des opérations noires.
Peu après le départ de Lorand, il recevait un appel de Franquin.
- Comissaire, nous avons reçu les informations de l'ordinateur où a été installé notre fausse copie du Projet MEMO.
- Et vous avez obtenu des donnés utiles pour nous?
- Il y a quelques choses que je ne sais pas interpréter. Je devrai appeler Benson, à Murcia. Ce sont peut-être des data comprimées envoyées par les trappes qu'il a mises. Si quelque chose peut vous être utile, je vous aviserai.
- Et rien n'en indique l'origine, l'endroit où se trouve la machine?
- Tout est passé par le réseau Tor. Le dernier répéteur, qui est le seul que nous voyons, se trouve en Allemagne. La police allemande pourrait le trouver et exiger l'information, mais cela remettrait à l'ordinateur antérieur d'une chaîne qui peut être longue car Tor a 3.200 "noyaux", qui peuvent même se renvoyer plusieurs fois les données avant d'arriver au destinataire final.
- Donnez-moi cette adresse. Je l'enverrai à Interpol pour que les allemands voient ce qu'ils pourraient faire.
- Note: Tor Project Inc. est une entreprise sans fin de lucre fondée il y a dix ans au Massachusetts, qui a pour fin assurer les communications anonymes sur internet. Elle dépend de volontaires qui prètent leur ordinateur pour réenvoyer et cacher le traffic d'internet, surtout dans le but d'assurer la liberté d'expression dans les pays où il y a contrôle gouvernemental. Mais le réseau est aussi utilisé par des délinquants de tout calibre.
Servais anota l'adresse IP puis fit la demande à Europol et l'envoya aussi à Rosenwald qui, bien que supposé détenu, était retourné en secret à Berlin. Il reçut peu après les remerciements de celui-çi, accompagnés de l'information de la CIA sur le délinquant dont il avait reçu le portrait-robot.
- La CIA connait cet homme et lui a donné le surnom de "John Death". Sa nationalité et son nom réel sont inconnus et il n'a jamais pu être arrêté. Nous avons su de sa présence au moins dans six villes de différents pays où, chaque fois il est apparu, a tué quelqu'un et a de nouveau disparu. Il semble être un expert pour traverser les frontières sans être identifié. Nous croyons qu'il agit sous contrat de services de sécurité de pays anti-occidentaux comme l'Iran et la Corée du Nord. Il ne laisse pratiquement jamais de témoin. Ceux qui ont pu le décrire ont survécu peu de temps, souffrant un accident ou disparaissant sans laisser de trace. Nous vous recommendons de protéger votre témoin, s'il est encore en vie.
Servais mit inmédiatement Trompel au courant, et l'envoya avec Yernault au domicile des parents de Ronstadt. Celui-çi était toujours en garde-à-vue à la PJ, mais il était possible que l'assassin ne le sache pas et aille le chercher chez lui. Quand les deux policier sortaient de leur auto et s'approchaient de la porte, ils en virent sortir le criminel, le reconnaissant par le portrait-robot. Ils sortirent leur arme et l'interpelèrent. A une vitesse incroyable, l'homme leur lança deux poignards -il devait les avoir prèts dans les manches- et s'enfuit en courant. Un des coutaux coupa le bras gauche de Trompel. Les détectives firent feu et une des balles atteignit le fuyard à l'épaule, ce qui ne l'arrêta pas. Il tourna le coin de la rue, monta sur une moto et s'enfuit à toute vitesse.
Yernault fit un tourniquet à Trompel pour arrêter l'hémorragie. Ils ramassèrent les poignards comme moyens de preuve, pour en analyser les empreintes. Ensuite, pendant que son compagnon restait près de l'entrée de la maison, l'inspectrice sonna à la porte et fut accueillie par monsieur Ronstadt. Elle s'identifia et entra. Elle montra alors le portrait-robot.
- Vous avez parlé avec cet homme?
- Il vient de sortir, en effet. Il nous a dit qu'il venait de l'Université Saint-Luc et voulait parler avec Kurt au sujet de sa participation à un projet de recherche.
- Comment s'est-il identifié?
- Il nous a montré une carte avec le logotype de l'université, mais ne portait pas son nom, qu'il ne nous a pas dit.
- Qu'avez-vous dit?
- Que Kurt avait été arrêté et que nous ne savions pas quand il serait libéré.
- Rien de plus?
- Non. Il est parti tout de suite.
- Bon. Cet homme n'appartient pas à l'université et est un dangereux criminel. Si vous le voyez de nouveau, avertissez-nous et, surtout, ne le laissez pas entrer.
Elle leur dit au revoir, sortit et emmena Trompel à l'hôpital qui recevait les policiers blessés, pour faire traiter sa blessure.